Le temps d'un haiku
Le temps d'un haiku
Pour commencer un ensemble de quatre haikus décrivant le temps qui passe : un jour, un mois, une année, une vie...
A l’abri de l’aube
fleur des champs épanouie
abeille aux anges
Au fil de l’eau brille
croissant métamorphosé
la lune en transe
Magie du soleil
tout s’éveille et verdit
chant de mille oiseaux
Le bonheur revient
la luciole s’en va
bougies allumées
Les paupières closes
il ne reste que prières
derrière l’enfer
Elle se souvient
des voyages des mots
entre pleurs et chants
Les saisons se suivent
les eaux jours amis se cachent
derrière feuillages
Si tout concourt à nous aspirer inexorablement dans les abysses de la laideur,
Plus que jamais, nous devons déployer les ailes de nos ultimes forces
Afin de s'en extirper pour aller voler haut, toujours plus haut
Là où l'on respire un air de bonté et de liberté.
Je m'accroche à mon poème
Je m'accroche à mon poème
Dans ce monde où le fracas dévore l'horizon,
Où sous le poids du mensonge,
Les mots bombardés s'effondrent,
Je m'accroche à mon poème fragile et profond,
Comme un refuge de lumière
Là où tout se régénère.
Les âmes innocentes sont piégées
Par la violence qui guette,
Et par des vérités soumises
Aux ombres assoiffées de glauque,
de monstruosité et de sexualité en étalage,
Arme dissuasive de domination des êtres violés.
Mais moi, je cherche ce vers secret qui éclaire mes abords.
De l’abîme, où l’innocence vacille et pleure.
Je m'accroche à mon poème
Comme à un phare où chaque mot me guide,
Comme un souffle ancien,
Transformant le chaos en danse aérienne.
Et dans cet espace pur,
Loin des cœurs brisés,
Je me fais libérer pour
Trouver enfin la paix.
Je m'accroche à mon poème fragile et profond,
Comme l'écho salvateur d'un monde nouveau
Qui m'indique le chemin vers la lumière,
Qui abrite le creuset,
Où la monstruosité est transmutée en Beauté.
Quand la vie nous fait peur
C'est avec un visage froissé par la tourmente,
Que nous traversons un paysage labouré par l'abandon et la soif endurante.
Faut-il avoir oublié les pulsions de son premier souffle de vie ?
Pour lui préférer cette autre mystérieuse, parfois effrayante
Inconnue qu'est la mort ?
Faut-il avoir oublié le premier vol de l'oiseau face à ce ciel et à son immensité si déroutante ?
Faut-il avoir oublié l'épreuve troublante
De l'enfermement de la chenille dans cette tombe-Chrysalide ?
Qui deviendra le creuset de sa métamorphose
En papillon aux ailes joyeuses et insouciantes ?
Faut-il avoir oublié toutes les symphonies de ces bourgeons de vie ?
Belles promesses de nymphes tellement émouvantes et envoûtantes ?
Faudrait-il avoir oublié...
Le courage d'aimer
Dans ce monde sans foi, sans loi,
Où les bourreaux sont couronnés en héros,
Où les enfants tombent
Comme les oiseaux aux ailes blessées,
Dans ce monde hypocrite, impudent et cruel,
Aux pieds et mains ligotés
Par les profits vils et consensuels,
Monde tapi dans l'ombre de
L'humain engourdi,
Et qui, dans ses peurs et dans sa lâcheté
Est englouti.
Il ne me parvient plus
Que l'alarme d'un silence
Plus lourd que le fracas
D'un présage sans la moindre baraka.
Mais moi, je refuse que la haine me brûle,
Même dans mes songes,
Je refuse d'entendre les méandres du mensonge.
Je refuse de porter l'indifférence en manteau
Et la surdité en bandeau.
Je refuse de porter les cendres en fardeau.
Malgré tout, comme l'ultime souffle de mon berceau,
Je continuerai à porter
La rose de mon bouclier.
De ma foi tenue dans un monde en force qui n'est pas révolu.
Mais moi, je n'ai jamais eu la force de la haine
Il ne me reste plus que celle d'aimer,
Même quand tout sombre et s’effondre.
Ah inspiration quand tu nous tiens !
Le poète est une éponge.
Ses chimères, il rallonge ;
Ses songes, il prolonge ;
De ses rêves, il nous revient.
De la grande dame blonde
Sourire doux et discret comme un voile,
Sur des rides maîtrisées,
Sous des cheveux d'or qui captent la lumière,
Elle se tient altière.
Elle est l'élégance d'un murmure de soie.
Elle est l'intelligence sans flamboyance.
Ses doigts fins et clairs jusqu'à la transparence,
Sont posés sur ses genoux croisés avec art,
Ses gestes lents et précis
Effleurent l'espace selon sa loi affranchie.
Sans hasard, des bijoux précieux, subtilement,
Rayonnent sur elle.
Elle s’avance, colombe silencieuse,
Derrière le pupitre, d'une voix posée et harmonieuse,
Elle déclame, puis chante
Elle s'arrête suffisamment tôt,
Pour attiser notre curiosité enchantée
Sous les feux des applaudissements,
D'un pas mesuré,
Elle retourne à sa place.
Elle lance un regard tranchant
Vers quelqu'un de l'auditoire
Brisant tout émoi.
Et soudain, je sens le froid glacial de sa loi.
Elle sourit encore,
Raffinement suprême.
Mais derrière ce masque envoûtant.
C'est la nuit mystérieuse qui règne.
Monologue d’un fœtus
Je crois que j’entends des bruits bizarres,
D’où tout cela vient-il, ce monde étrange ?
Je suis bien, ici, au chaud, bercé,
Par les vaguelettes de ce doux liquide,
Accueillant, rassurant, mon cocon de paix.
Au fil des jours, certaines voix me reviennent,
Douces, familières, presque comme un chant.
Que m’arrive-t-il ?
Mon espace rétrécit,
Je grandis, je m’étire, mais me sens engoncé,
Tant je suis en sécurité, lové dans ce nid.
La nourriture arrive, fidèle, par ce tuyau,
Et parfois, je suce mon pouce, tranquille.
Mais un jour, je sens des secousses, des tremblements,
Des cris résonnent, de plus en plus forts,
Et soudain, je glisse, emporté dans un tunnel.
Là, tout se précipite, je m’éloigne de mon nid,
Mon doux cocon disparaît.
Je suis tiré,
Le grand froid m’envahit, mordant ma peau.
On me tire, m’extirpe, je suffoque
Moi, poisson, je ne sais pas respirer l’air.
On me secoue, me frappe dans le dos,
Ma poitrine éclate, je crie, déchiré.
Puis, on m’enveloppe, me pose sur un ventre,
Un ventre familier, où les battements apaisent,
Je reconnais cette cadence, je suis un peu rassuré.
Mais l’espace est immense, et je me perds,
Des gros visages se penchent, j’ouvre les yeux,
On tire mes doigts, les voix résonnent,
Mais un petit visage, là-bas,
N’a pas l’air content de me voir ici.
Quand je pense à Toi
Quand je pense à Toi
Je ne me souviens plus
Si je suis un homme ou une femme,
Quand j'écris sur
Les malheurs incrustés,
Les chagrins écartelés
Et les peurs figées,
Quand j'écris sur
Les sourires élagués,
L'émerveillement ressuscité
Et la foi chevillée à l'existence dépouillée,
Je ne me souviens plus
Si je suis un homme ou une femme.
Quand je pense à Toi
Quand j'écris,
Je suis uniquement une Âme.
Ô Toi qui m’est si familier
Ô Toi le Tout-Puissant,
Programmateur du Monde,
Toi qui tisses le Cosmos
D'un fil précis d'une main
Parfaite et féconde.
Maître de l’infini, des astres et des êtres visibles et invisibles,
Ô Toi Codeur de l'éternel indestructible,
Tu dessines les méandres des cieux,
Des pétales, de l'écaille, et de la plume.
Tu ordonnes les étoiles,
Sous le regard éteint
De notre orgueil.
Chaque pierre, chaque racine, chaque souffle de vie,
Chante ta loi sans faille,
Avec une rigueur que l’homme effronté
Ignore dans sa quête de pouvoir insensé.
Nos yeux égoïstes,
Aveuglés de folie et d'ignorance,
Bafouent le faible sans défense
Et l’innocence de l'enfance.
Nous fermons nos cœurs et nos mains
Et tournons le dos à tes horizons impénétrables.
Que pouvons-nous voir de Ta pure beauté
Quand la laideur de la méchanceté
Déforme nos figures,
Quand la vanité nous rend froids et cruels,
Insensibles aux larmes et
Sourds à tes lois gravées
Au cœur de Ton incessant labeur ?
Mais moi, je Te vois et je T'entends dans la
Rigoureuse précision de chaque détail
De tes créations végétales,
Dans chaque métamorphose fœtale,
Dans chaque explosion boréale,
Dans chaque bouleversante fractale,
Dans chaque immuable édifice,
Sublime transmission de bourgeons d'éternité...
Que le jour de mon retour à Toi
Soit un jour de joie !
Mon fragile et éphémère
Poème terrestre, je poserai,
De Ton Pardon et de Ton Amour, je m'abreuverai.
Je te rejoindrai dans le monde du langage de la conscience,
Là où il n’y a ni petit ni grand,
Là où, par la simple énergie de l'Amour,
Tout se crée,
A ce moment-là, je me dirai :
C'est donc Toi le Secret, le Mystère,
La Vérité, l'Inconnu qui m'est si familier !
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